ELIOTT RP USELESS

Eliott était perturbé – c’était bien le mot qui décrivait à la perfection son état d’esprit. Il était perturbé, et ce pour de nombreuses raisons. La première, certainement la plus évidente pour une petite poignée des gens qu’il connaissait, était qu’il n’avait pas de nouvelle de Lance. Aucune. Pas une lettre, pas un message, rien... Et autant dire qu’avec ce qu’il s’était passé, le jeune homme était plus qu’inquiet. Il ne montrait pas son anxiété, évidemment : il gardait tout au fond de lui... Mais si on l’observait, on pouvait remarquer qu’il était plus prompt à la mélancolie qu’à son habitude. Souvent perdu dans ses pensées, le regard dans le vide, le menton au creux de sa paume... Il s’interrogeait. Malheureusement, pas uniquement à cause de Lance.

La Divine était morte. Il était heureux, évidemment, son frère était, en quelque sorte, vengé. Mais alors... Alors pourquoi ne sentait-il pas mieux, au fond ? Pourquoi y avait-il toujours cet énorme vide qu’il aurait pensé combler en accomplissant sa vengeance ? Il s’était demandé, pendant un moment, si ce n’était pas la frustration de ne pas avoir tué l’horrible femme lui-même. Mais s’il devait être honnête, il avouerait qu’il s’en moquait bien de qui l’avait tué, tant qu’elle était morte. Alors pourquoi est-ce qu’il n’allait pas mieux ? Un soupire s’échappa d’entre ses lèvres, tandis qu’il finissait par se redresser sur son lit, grimaçant. Maya faisait grise mise, allongé sur le tapis, levant sur lui des yeux de chiots battus. Elio, lui, dormait tranquillement sur son perchoir. Voir le faucon, si paisible, lui brisait le cœur. Il se rendait à présent compte qu’il s’était tellement concentré sur sa vengeance qu’il n’avait pas pensé à faire son deuil. C’était peut-être ça, le vrai problème.

« Aller viens, Maya. Bougeons avant qu’ils pensent tous que je suis mort. » La jeune Mabari bondit immédiatement sur ses pattes, suivant son maître qui se traîna jusqu’aux cuisines. Il était fatigué, son nez le lançait encore un peu malgré les soins et le pansement. Ses côtes le tiraillaient à chaque pas, et il craignait toujours de rouvrir sa lèvre dès qu’il souriait. Pourtant, il allait bien. On l’avait soigné, il n’avait plus rien à craindre. Il lui fallait juste un peu de repos, mais il n’allait pas s’affaisser sur lui-même à jamais, même s’il semblait pâle comme la mort. Lui vivait, justement. Pas comme Aria... Pas comme Evalyria. Pas comme tant d’autres. Ce qui l’emmena alors à penser à Draco. Voilà un moment qu’il n’avait pas vu l’ancien Templier et, lorsqu’il questionna les commis aux cuisines, ont lui appris que personne ne le voyait beaucoup en ce moment.

Contre toute attente, et même s’il n’en avait pas, mais alors vraiment pas envie dans son état, Eliott demanda à lui faire préparer une petite assiette avant de rendre à la chambre de Draco. Il toqua légèrement contre le panneau de bois, avant de l’ouvrir. « Hey Drac’. » lança-t-il d’une voix enjouée, autant que possible dans cette situation. C’est-à-dire, pas tellement. Mais on pouvait le pardonner, après tout ce qui était arrivé, trop de joie aurait paru suspect. Et, à vrai dire... L’homme lui-même ne semblait pas vraiment dans son assiette. « Désolé de ne pas être passé avant. Je t’ai apporté quelque chose à manger. » Il marqua son hésitation, avant de lui tendre le plateau : « On m’a dit que tu te faisais discret. C’est vrai que... Ces pertes sont terribles. Mais ils se sont sacrifiés pour tuer la Divine et, malgré tout, ça a payer. C’est ce qu’il faut se dire... »